Double lampe ornée à l'huile pour intérieur
Modèle anglo-saxon
USA - Début 19 e siècle
N° d’inventaire 2013
Musée du Luminaire (Mulum)
Cette lampe a orné les salons, salles à manger et bureaux en Angleterre et aux USA durant les trois quarts du
19 e siècle. Elle fonctionne à l’huile végétale ou animale (baleine). Depuis la fin du 18 e siècle, le « bec d’Argand » à mèche ronde va permettre d’éclairer à la manière de dix bougies. Il fonctionne avec un réservoir surélevé qui amène peu à peu l’huile et lui permet de bruler durant plusieurs heures.
Le feu est la première forme d’éclairage de l’humanité (entre 400.000 et un million d’années selon les dernières recherches), l’huile animale (graisse) fut la seconde. La graisse était placée dans des pierres creuses avec des éléments végétaux noués ensemble pour former une mèche. Celle-ci était imprégnée par capillarité et alimentait la flamme éclairante. Voici 10.000 ans, les hommes préhistoriques commenceront à utiliser les huiles végétales qui ont une meilleure odeur et produisent moins de fumée.
Durant l’Antiquité, les progrès sont essentiellement esthétiques : terres cuites et pierres ornées, bronze, etc. L’écriture va permettre aux techniciens de commenter les problèmes liés à l’utilisation des huiles végétales et animales : mauvaise capillarité du combustible, obligation de pencher la lampe à intervalle régulier pour amener l’huile à la flamme et éviter qu’elle ne s’éteigne. La durée de l’éclairage est à peu près de deux heures ; il faut ensuite remettre de l’huile et couper la mèche en tissu (lin, coton).
Le grand progrès du Moyen-Âge est, en 550, « l’abreuvoir d’oiseau » de Cassiodore (485-580), moine italien. La pression atmosphérique amène, de manière constante, l’huile vers l’orifice et alimente ainsi la flamme. Ce type de lampe peut fonctionner jusqu’à 6 heures environ.
En 1782, François-Pierre-Amédée Argand, dit Ami Argand (1750-1803), invente la lampe à réservoir latéral et double courant d’air. Le bec moderne est né. Il est surmonté d’un verre pour protéger la flamme et augmenter son tirage. Pouvant éclairer jusqu’à six heure d’affilée, cette lampe est aussi dix à douze fois plus puissante qu’une simple chandelle. La lampe à réservoir surélevé, à « abreuvoir d’oiseau » et à bec d’Argand, est le plus grand progrès de l’éclairage à huile avant les lampes mécaniques de Guillaume Carcel (1750-1812) et les lampes à modérateur. En 1800, Guillaume Carcel invente une lampe sur pied, dont le système d’horlogerie actionne un piston qui fait monter l’huile de manière régulière jusqu’au bec. La lampe à modérateur voit le jour en 1837. Elle reprend le principe des lampes à pompe : un ressort comprime l’huile dans le réservoir qui remonte vers la mèche. Toutes ces lampes, de par leur perfectionnement, réclament un entretien conséquent. Il faut les remplir et les nettoyer, régler ou changer les mèches, etc.
Lorsque le pétrole (huile minérale) est raffiné au milieu du 19 e, il devient le principal concurrent, avec le gaz, de l’éclairage millénaire à l’huile (animale et végétale). Son avantage est sa plus grande inflammabilité et une meilleure capillarité qui ne nécessite pas de principe physique ou mécanique pour amener le combustible à la mèche. Dans le film « Lincoln », réalisé par Stephen Spielberg en 2012, le président discute à plusieurs reprises auprès de cette lampe emblématique des intérieurs anglo-saxons du 19 e siècle.
Note : Lampe découverte par les soins de monsieur Alain Landenne, collectionneur. Restaurée par monsieur Paul-André Tenaerts. Les tubes en verre (intérieur des globes) ont été façonnés par Alice Dubus, souffleuse de verre pour l'Université de Liège.
Philippe Deitz
Responsable du Musée du Luminaire - Mulum
Retrouvez dans le document plus bas le texte ainsi que image du système: "abreuvoir d'oiseau"