De la rue au musée : Jacques Dartois (1754-1848) et « L’Éloge de la Paix de Fexhe »

Une artère liégeoise

Si Jacques Dartois résonne davantage par rapport à la rue du même nom, il nen reste pas moins un personnage dimportance que Liège a compté.

Lartère qui part de la place de Bronckart pour aboutir rue des Guillemins reçoit cette dénomination de « rue Dartois » en 1857. Tel est lhommage rendu par le Conseil communal à la mémoire de cet orfèvre ciseleur.

Jacques Dartois

Baptisé le 2 mai 1754, Jacques Dartois voit le jour au temps de la « douceur de vivre » pour les privilégiés sentend. Son père, Jean Melchior, est lun des meilleurs orfèvres liégeois de la fin de lAncien Régime. À Paris, Jacques Dartois se perfectionne dans son art et revient après avoir remporté un succès certain. De son union avec Marie-Jeanne Malherbe, il ne laisse pas de descendant, leur unique enfant étant mort accidentellement. Jacques Dartois décède à Liège le 12 août 1848 et est, selon son désir, enterré à la Boverie de Lize-Seraing.

Une importante étude concernant lorfèvre et son oeuvre vient de paraître (1).

L’Éloge de la Paix de Fexhe

Le plus ancien relief ciselé à sujet historique de la production de Jacques Dartois porte le millésime de 1790. Il met en scène le prince-évêque Charles dOultremont, au milieu dune nombreuse assem­blée. Sa main, ouverte, est au coeur de la composi­tion. Elle est tournée vers un vieillard assis sur un siège surélevé par deux marches. Le haut du dossier est orné dun relief qui représente un épervier pris dans des rets. Cest, selon lidée du moment, le sym­bole du Tribunal des XXII, vénérable institution lié­geoise instituée par la Paix de Fexhe en 1316.

Le prélat est bien loin de lever solennellement la main pour prêter serment, et cest parfaitement normal, puisquil na jamais eu à jurer dobserver la Paix de Fexhe, si ce nest dans le cadre de la capitulation élaborée par le chapitre cathédrale. Il se tourne vers un personnage identifié comme lun des deux bourgmestres alors en fonction, Georges-Albert de Goër de Herve, reconnaissable à la « clé magistrale » qui pend à sa boutonnière. Dans son dos est présent le colonel Théodore-Antoine de Berlaymont, en attirail militaire (grand sabre courbe à la hongroise et sabretache aux armes de la principauté et du prince-évêque).

Tout contre le siège, touchant du pied la marche inférieure, se tient vu de dos, Maximilien de Geyr de Schweppenburg, chanoine de Saint-Lambert, abbé de Visé, membre du Tribunal en 1742 et 1744.

Jacques Dartois confère à la plupart des visages une personnalité bien marquée.

Le relief est dédié à un comte dOultremont de Wégimont. Cest un des fils de Jean-François-Georges, soit Charles-Ignace-Jacques (1753-1802), soit Adrien-Jean-Baptiste-Théodore (1758-1798).

L’Éloge de la Paix de Fexhe est exposé en 1957 au Sterckshof à Deurne, puis aux Musées royaux dArt et dHistoire de Bruxelles, et en 1958 à Dinant.

(1) Pierre COLMAN et Soo Yang GEUZAINE, « Jacques Dartois orfèvre et ciseleur liégeois (1754-1848), in Bulletin de l’Institut archéologique liégeois, tome CXVIII, Liège, 2014, p. 193-261.

Soo Yang GEUZAINE,
Responsable du département des Arts décoratifs 

Légende photo :

Au centre : L’Éloge de la Paix de Fexhe. (détails)
Relief, cuivre repoussé, ciselé et gravé. 42 x 50 cm
Signé et daté « J. DARTOIS INV. ET FECIT 1790 ». Grand Curtius, inv. I/7017.