Le cabinet d’armes d’Antoine Rongé de Liège
Il y a peu, l’asbl « Les Amis du Musée d’Armes de Liège » a acquis en vente publique un album contenant les croquis des armes anciennes de la collection d’Antoine Rongé (1764 – 1834), fabricant d’armes liégeois. 153 planches dessinées au crayon illustrent les oeuvres les plus remarquables de cet ensemble aujourd’hui dispersé. Les précèdent 8 feuillets imprimés collés au milieu des pages et constituant le catalogue de la vente, ainsi qu’une préface manuscrite datée du 10 septembre 1876, qui fournit quelques renseignements sur l’homme et ses collections.
Les dessins des armes et armures sont répartis selon une typologie plus détaillée que celle du catalogue imprimé qui ne comprend que trois rubriques. Le classement s’établit comme suit :
- Armes défensives : armures de mailles, armures en fer ou en acier, parties d’armures
- Armes offensives : armes offensives de main [haches d’armes, couteaux de brèche, masses, etc. ; armes d’hast ; épées, sabres, armes de guerre ; armes de chasse, poignards] ; armes offensives de jet [arbalètes, arcs ; armes à feu : armes à feu non portatives, armes à feu portatives (canons à main ; arquebuses et mousquets, à mèche et à rouet ; carabines et mousquetons à rouet ; fusils à silex ; fusils à vent ; pétrinaux, pistolets ; armes complexes ; cartouchières, poires à poudre)].
Antoine-Guillaume Rongé est le plus jeune des trois fils de Jean-Henri Rongé et de Marie-Anne Bougneuilles. Après son apprentissage, il s’établit comme fabricant d’armes en 1789. Son négoce se révèle prospère, de sorte qu’il peut satisfaire son goût pour les antiquités et les armes anciennes, pour lesquelles il n’hésite pas à mettre le prix. Deux pièces de sa maison à l’enseigne de la Griffe d’or (située à l’angle de la rue des onze mille vierges et de la rue royale, aujourd’hui disparues au profit de « l’espace Tivoli ») sont dévolues à la collection : objets d’art au rez-de-chaussée, armes au premier étage, dont quatre armures complètes. Malgré les sollicitations nombreuses, notre homme refuse obstinément de se défaire de pièces de sa collection de son vivant. À sa mort, il laisse sept enfants qui, pour sortir d’indivision, vendent les objets d’art et font établir le catalogue du cabinet d’armes, imprimé en 1835. Celui-ci cependant, écrit par des mains dépourvues d’expertise, est considéré comme « défectueux ». La Ville de Liège doit renoncer à l’achat des armes, les finances communales ayant été épuisées par la révolution de 1830. C’est un antiquaire londonien, dont l’identité nous est inconnue, qui emporte l’affaire.
Les croquis repris dans cet album constituent donc l’unique souvenir de cette collection, dont l’étude détaillée reste à entreprendre.
Philippe Joris,
Conservateur du département des Armes