Une croix processionnelle de l'église de Wonck

Quelques éléments représentatifs de l’art religieux médiéval
 

UNE CROIX PROCESSIONNELLE DE L’ÉGLISE DE WONCK

Laiton ciselé, gravé, doré, émaillé
58,5 cm x 23,3 cm
Milieu du 13 e siècle
N° d’inventaires : GC.REL.10b.1937.32168
J 25 (n° d’inventaire MARAM). 260 (n° d’inventaire Puraye).

Cette croix processionnelle provient de la tour de l’église de Wonck (Bassenge, Province de Liège) où elle a été découverte avant 1937. Cette date est celle du premier inventaire des collections du département.

La figure centrale du Christ a disparu. Il n’en subsiste désormais que les traces de fixations nous autorisant à l’estimer à 15,5 cm de haut. Le bras gauche a, lui aussi, disparu. À la base, son extrémité pointue (« la soie ») est destinée à être insérée dans une hampe. Fichée sur un pied, elle a aussi pu servir de croix d’autel. Composée de cuivre, elle est dorée, ciselée, gravée, émaillée et bordée d’un listel riveté. La croix est datée du milieu du 13 e siècle.

Les motifs figuratifs représentés sur la croix sont riches en informations et méritent que l’on s’y
attarde. Car ces motifs sont assez représentatifs de ceux que l’on peut trouver habituellement
dans l’art médiéval.

L’ AVERS

La main du Père

 

La main du père

La représentation de Dieu dans l’art chrétien d’Occident évoluera au fil des siècles mais la première image-symbole qui a été utilisée est la main droite de Dieu sortant des nuées (Dextera Dei).

Sous l’inscription INRI, dans la partie supérieure de la croix, Dieu bénit son Fils au moment où il rend son dernier souffle de vie.

Synagoga et Ecclesia

Synagoga et Ecclesia

 
Synagoga (la personnification de la Synagogue) apparaît à l’extrémité du bras de la croix. À mi-corps et la tête nue, elle se présente les cheveux défaits et les yeux bandés. Elle se détourne du Christ et laisse tomber les Tables de la Loi. De la main droite, elle tient une lance renversée et brisée, munie d’un gonfanon (morceau d’étoffe porté en bannière).

La figure d’Ecclésia (la personnification de l’Église) devait vraisemblablement lui faire symétrie sur le bras gauche de la croix. Selon les conventions de l’époque, elle devait être d’allure droite et fière, coiffée d’une couronne, tenant un sceptre ou une hampe crucifère.

Cette association de « l’Église et de la Synagogue » à la scène de la crucifixion est fréquente dans l’art médiéval. Toutes deux apparaissent comme de très belles femmes dont une seule est représentée aveugle. La première symbolise le christianisme ; la seconde le judaïsme. Leur présence illustre le triomphe de l’Église et l’aveuglement des Juifs qui n’ont pas su reconnaître la divinité de Jésus-Christ.

Adam

Adam

Un personnage barbu est représenté à mi-corps dans la vignette inférieure de la croix. Il tend un calice destiné à recueillir le sang qui s’écoule des pieds du Christ.

L’attitude ainsi que l’absence d’insigne ou de vêtement caractéristique ne permettent pas d’identifier le personnage, peut-être un donateur, un ecclésiastique ou un religieux.

Dans l’imagerie médiévale, il est bien un personnage qui peut apparaître sous plusieurs formes au pied de la croix rédemptrice : Adam.

Adam est le premier homme par qui le péché est entré dans le monde. On le trouvera figuré symboliquement par son crâne, son squelette ou encore sa résurrection. Ainsi, on le voit quelquefois sortant de son tombeau, les mains jointes vers le Christ. Parfois, il est accompagné d’un calice posé sous les pieds du Crucifié. Dans d’autres cas, il apparaît, notamment, avec le calice entre les mains, recueillant le sang du Rédempteur.

Adam apparaît comme un vieillard barbu vêtu d’un linceul ou d’une tunique, rappelé à la vie grâce aux vertus vivifiantes prodiguées par le sang du Christ.

Le tétramorphe

Le tétramorphe - Croix - Grand Curtius Liège

Cette composition porte le nom de tétramorphe, c’est-à-dire qu’elle figure la représentation des quatre évangélistes sous leurs formes allégoriques.

Les carrés aux extrémités de la croix ainsi qu’en son centre accueillent les symboles ailés des quatre évangélistes. Ils entourent le Christ aujourd’hui disparu.

Une inscription gravée sur un phylactère permet d’identifier chacun d’entre eux : l’aigle pour Jean (Johannes), le bœuf pour Luc (LUCAS), l’ange pour Mathieu (Matteus). Marc, le lion, devait se trouver à gauche.

Du Christ, il ne reste plus que ce qu’on appelle le nimbe crucifère au centre, comme témoignage de sa présence. Le nimbe, ou auréole, est ce disque de lumière placé autour de la tête des personnages sacrés.
 

LE REVERS

Les anges adorateurs

Sur la croix, il ne subsiste que trois anges sur les quatre, chacun aux extrémités de celle-ci.
Les deux en haut et en bas font face tandis que l’intermédiaire est de profil.
L’ange est une figure majeure de l’iconographie chrétienne : il a fonction de médiateur entre le divin et l’humain.

Dans le royaume céleste, les anges sont les instruments de la volonté divine. Ils sont notamment les exécuteurs de la justice divine. Ils se mettent également au service du Christ et des hommes. Leurs fonctions sont diverses mais ils sont essentiellement des messagers de Dieu, des guides pour les hommes.

 

Les anges adorateurs

L’agneau vexillifère

Un agneau est représenté à la croisée des bras de la croix. L’iconographie liée au thème de l’agneau est très riche et variée.
L’agneau est symbole du Christ et de son sacrifice.
En Occident, depuis l’Antiquité, la hampe avec l’étendard rappelle les symboles de pouvoir et de victoire. Ici, dressé sur une croix, il rappelle la victoire sur la mort.
Dans ce cas-ci, l’agneau porte l’étendard de la Résurrection. Il est alors nommé « vexillifère » : du latin vexillum « étendard » et ferre « porter ».

L’agneau vexillifère

 

La croix en vidéo :

La vidéo - Grand Curtius Liège

 

Christelle Schoonbroodt
Conservatrice
Département d’Art religieux et d’Art mosan / Grand Curtius

Bibliographie :
Albert Lemeunier, Monique de Ruette et Gilberte Dewanckel, La croix processionnelle de Wonck au Musée d’Art religieux et d’Art mosan de Liège : étude stylistique, technologie et conservation, dans le « Bulletin de l’Institut Royal du Patrimoine Artistique », vol. 23,1990-1991, Bruxelles, p.187 à 200.

 

Emplacement de l'exposition

La croix est visible dans la vitrine de l'objet du mois. Hall d'entrée du musée Grand Curtius à Liège.

Légendes visuels

Une croix processionnelle de l'église de Wonck : vue d'ensemble et de détail de la croix. Copyright Ville de Liège - Grand Curtius.