UN COQ EN BRONZE ÉMAILLÉ... MADE IN BRITANNIA
UNE STATUETTE DU 2e SIÈCLE APRÈS J.-C. En 1910, le comte Claude de Pimodan (1859-1923) fait don à la Ville de Liège d’un nombre important d’objets de collection. Parmi ces antiquités, acquises auprès de membres de l’Institut archéologique liégeois, figure une remarquable statuette d’époque romaine en bronze émaillé, de grande qualité d’exécution, représentant un coq chantant dressé sur un socle.
La statuette qui date du 2e siècle ou du début du 3e siècle apr. J.-C. aurait été mise au jour à Tongres. Elle présente au niveau du poitrail, une ornementation émaillée disposée en triangle, composée de six rangées d’émaux champlevés de couleur bleu profond, rouge et turquoise simulant le plumage. Les cinq premières rangées sont constituées d’émaux de forme triangulaire, aux angles arrondis ; la sixième rangée étant constituée d’émaux en forme de croissant. Le dos est pourvu d’un couvercle orné lui aussi d’émaux champlevés, comme le suggère la petite alvéole en forme de croissant encore bien visible à l’œil nu. Seule manque la queue qui était soudée à l’arrière-train de l’animal. L’ornementation émaillée concerne aussi les yeux du gallinacé qui sont constitués d’une pupille d’émail rouge entourée d’un cerne de couleur turquoise.
UN OBJET RARE
Il s’avère que cet objet est d’une infime rareté ; seuls dix exemplaires de coqs en bronze émaillé étant actuellement répertoriés pour les provinces du nord-ouest de l’Empire. Six coqs ont été découverts en Angleterre, indice possible d’une production locale tandis que les quatre autres ont été mis au jour sur le continent : deux aux PaysBas, un en Allemagne et notre exemplaire provenant de Tongres. Une des statuettes anglaises découverte par un détectoriste en 2004, à Slyne-with-Hest, Lancashire présente de nombreuses affinités avec notre statuette, tant au niveau de la forme que de la disposition des émaux. Cette forte similitude entre ces deux statuettes laisse à penser qu’elles seraient issues du même atelier.
Le site de Castleford, situé dans le Yorkshire de l’Ouest, témoigne de la continuité de la production artisanale d’objets romano-britanniques en bronze émaillé, depuis la fin du 1er siècle et durant tout le 2e siècle apr. J.-C., période durant laquelle le commerce des vases émaillés (bols, gobelets, patères, aiguières, balsamaires, gourdes…) a connu un véritable essor. Même si aucune preuve n’a pu être apportée à ce jour, certains pointent ce site comme lieu de production probable de ces coqs en bronze émaillé.
UN SOUVENIR MADE IN BRITANNIA
Ces statuettes ont souvent été décrites comme des lampes à huile, voire comme des réceptacles à bijoux. Comme pour certaines d’entre-elles, le couvercle était soudé au corps de l’animal, rendant impossible l’accès à l’espace intérieur creux de l’objet, ces propositions de fonctions ne tiennent plus la route. L’hypothèse actuelle voit en ces objets de jolis bibelots, peut-être ramenés de Britannia comme souvenir ; un des deux coqs mis au jour aux PaysBas portant, sur le socle, une dédicace à une divinité locale faite par un vétéran de la VIe légion Victrix qui était stationnée à York, Yorkshire du nord.
Jean-Luc Schütz
Conservateur du département d’archéologie / Grand Curtius
L'OBJET EN VIDEO
Emplacement de l'exposition - Objet du mois.
L'objet est dans la vitrine de l'objet du mois. Hall d'entrée du musée Grand Curtius à Liège.
Légendes visuels
Un coq en bronze émaillé.
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